Solitude, quand tu nous tiens

Oui possible...

Elle lui demandait son histoire ? Soit elle raconterait tout ce qu'elle pourrait mais il n'y avait pas grand chose. Sa vie était d'un ordinaire... Elle poussa un soupir.

Je suis née dans une famille de trois enfants. Mon père travaillait beaucoup et était souvent absent. Voyages professionnels. Ma mère, elle, avait arrêté le travail à ma naissance et consacrait maintenant son temps à s'occuper de moi et de mes frères. J'aimais beaucoup ma mère et mes deux grands frères. Puis ils ont grandis et sont partis fonder leur propre foyer. Ils nous donnaient de leur nouvelles de temps en temps, de plus en plus rarement puis finalement plus du tout. Puis un jour mon père est mort. Ma mère a du reprendre le travail mais elle était très peu payé et travaillait beaucoup. Tous les soirs elle rentrait un peu plus fatiguée. Elle avait du mal à me nourrir et m'a proposé de venir dans ce pensionnat. Je n'avais pas beaucoup d'amis là-bas et entre temps j'avais découvert mon don. J'ai fait l'erreur d'accepter. Maintenant je regrette de l'avoir laisser seule mais c'est trop tard. En acceptant je lui ai prouvé que cela m'attirait et elle ne voudra pas que je rentre à la maison. Pour mon bonheur.

Mya regarda Zaz, elle n'aimait pas parler d'elle.

Rien de bien intéressant tu vois...

"Très interressant parce que c'est une vie ! Et chaque vie est différente, et cela donne toute sa richesse aux souvenir, tu n'est pas d'accord ?"

Dit elle d'un ton très doux, assurée que toute cette remontée de souvenir venait de fendre le coeur de Mya

Oui tu as raison. Mais les souvenirs des autres ne sont pas toujours du plus grand intérêt. Ils sont importants pour la personne à qui ils appartiennent mais peuvent paraître bien simples aux yeux des autres...

Son regard devint vide et un air songeur se peint un instant sur sa figure.

Je n'aime pas beaucoup parler de moi... Mais il me semble que je ne sais pas grand chose de toi. C'est à ton tour maintenant de me dir d'où tu viens.

"Moi ?"

Oui, elle. Ses yeux devinrent vides, elle se fit songeuse. Comment raconter tout cela, depuis jamais, qu'on se le dise, elle n'en avait parlé, de toutes ses années d'enfances. Des non-dits, des pensées enfouies au plus profond de sa mémoires. Peur d'en parler, car peur de reculer, ridicule mais c'est ainsi. Il faut en parler quand même, il paraît, ça forge le caractère, ça fait grandir...

"Je viens d'une famille noble, rien de terrible, j'avais deux chambres, une écurie ren qu'à moi, des centaines de cadeau amoncelés autour du sapin à Noel...Mais pas d'amour, jamais. Alors tu sais, quand on a 16 ans et qu'on nous oblige à enlever ses coudes à table, on prend vite la vie en grippe."

Elle s'arreta quelques secondes, pour rire un bon coup, un peu jaune, peut être.

"Disons que la vie de chateau n'était pas pour moi, alors j'ai pris la poudre d'escampette..."

Mya vit un voile passer sur les yeux de Zaz. Une tristesse enfouie. Les gens avaient tous une quelconque tristesse enfouie au fond de leur esprit, une peur qu'ils ne voulaient pas laisser sortir de peur de la voir. Sa vie n'avait pas été joyeuse apparement ! Mais elle était partie. Elle le disait sur un ton léger mais ça n'avait sûrement pas été une décision simple à prendre. Une vie sans amour... Ou peut être une façon d'aimer trop peu visible... Il y a de quoi fendre le coeur d'une jeune fille. Ce ne sont pas les cadeaux qui ont de la valeur c'est l'affection qu'ils représentent. Et de l'affection, Zaz en avait manqué. Et en manquait peut être encore...

Es-tu sure que ta famille ne t'aimait pas ? L'affection n'est pas toujours bien visible. Parfois c'est une douleur que l'on cherche à cacher sous un masque d'autorité...

Elle éclata d'un grand rire, un peu jaunit par le temps et les souvenirs.
"Ah, si l'affection, j'en avait, elle était cachée sous les coups reçus quand je me tenait mal à table !"
Elle soupira.Zaz aurait donné sa vie, pour, parfois, avoir un "je t'aime", un calin, une caresse du bout des doigts fins de sa mère, un sourire, un air fier...Mais rien, nada.

Mya baissa les yeux, pensive. On lui avait toujours dit que les gens qui battaient leurs enfants le faisaient souvent par peur. Peur de leurs souvenirs d'enfance où on les avaient battus aussi ou bien peur tout simplement de leur enfant. Des histoires cachées qui meurtrissaient leur coeur et qui faisaient qu'ils détruisaient celui de leur progéniture. Mais que répondre à ça ? De l'affection elle n'en avait pas eu. Elle aurait pu en avoir mais elle n'en avait pas eu. Les blessures du coeur sont celles qui font le plus de mal car elles restent dans le temps, parfois sous une autre forme mais elles restent. Sauf si on gagnait le combat. Sauf si on arrivait à se relever et à avancer de nouveau. Zaz s'était-elle relevée ? Mya n'en savait rien. Elle comprenait certaines choses mais la plupart lui échappaient. Elle voyait certaines choses dans le coeur des gens, des choses visibles, mais la plupart restaient cachées. Trop enfouies. Et Mya ne voulait pas révéler ce qu'on avait tant cherché à protéger des regards. C'était souvent des douleurs trop importantes. Tic-tac. La pendule lui rappela encore une fois qu'elle était en train de sombrer dans ses pensées. Elle releva la tête et poussa un soupir.

La vie est bien loin d'être simple...

Zaz éclata d'un grand rire, sncère cette fois.Oui, la vie n'était pas simple, elle le savait bien, elle avait vécu toutes ses facettes.Depuis, elle avait formé une carapace autours d'elle, sorte de mur invisible qui la protégeait de tout, et surtout de tous. Elle soupira et se leva. Il fallait quitter la jeune femme, il se faisait bien tard...

"Je le sais bien, du moins j'ai commencé à le comprendre..."

Mmm...

Elle bailla à s'en décrocher la machoire. Toutes ses réflexions la fatiguaient. C'était le moment de regagner sa chambre. Il commençait à se faire tard. Elle se leva à son tour et se dirigea vers la porte.

Je te souhaite une bonne nuit... ou ce qu'il en reste.

Puis elle sortit et se dirigea vers son dortoir.